
Le PsychoKernel formalise la manière dont les systèmes humains (sociétés, organisations, familles) traversent et intègrent les crises pour évoluer vers de nouveaux paradigmes. Il éclaire cinq « couches » interdépendantes – de l’écologie externe au récit – qui constituent le « code-source » psychique des collectifs :
- Perturbation
Un choc extérieur (catastrophe écologique, crise économique, disruption technologique) vient briser l’équilibre existant et exposer l’inadéquation du paradigme en place. - Écologie externe
Le système explore un nouvel équilibre dans ses interactions avec l’environnement : innovation technique, nouvelles infrastructures, organisation sociale modifiée. - Écologie interne
Les cadres cognitifs (concepts, représentations mentales) se stabilisent au sein des individus : ils incarnent le nouveau « normal » psychique, permettant d’interpréter et de digérer la perturbation. - Cadres systémiques
Ces cadres donnent naissance à règles, rituels et pratiques collectives : lois, procédures, institutions, pratiques culturelles qui figent la nouvelle donne et facilitent la coordination. - Croyances pratiques
Les pratiques quotidiennes (travail, consommation, rapports sociaux) valident ou ajustent en permanence les croyances : ce rapport au réel consolide ou fragilise le paradigme naissant. - Récit
Un narratif (métaphore, mythe, vision du futur) s’élabore pour rendre compte de la rupture et justifier le nouveau modèle. C’est le ciment symbolique qui fédère l’action collective.
Ces six étapes forment une boucle itérative : chaque nouveau récit conditionne les croyances, les pratiques, les cadres et l’écologie interne, jusqu’à ce qu’un nouveau choc (perturbation) relance le cycle.
Pourquoi la systémique ?
- Code-source invisible
Nos comportements découlent à plus de 80 % des récits, croyances et cadres en vigueur, comparables aux racines et au tronc d’un arbre : ils restent largement inconscients, faute d’attention systémique. - Myopie du changement
Quand on cherche à « changer » uniquement par des injonctions au niveau des feuilles (comportements individuels), sans toucher aux racines profondes, on crée une pression paradoxale : l’individu est épuisé et la transformation reste superficielle. - Épuisement collectif
Les sociétés modernes traitent en priorité l’écologie externe (infrastructures, technologies) et interne (compétences, apprentissages), mais négligent les couches profondes (cadres et récits). On absorbe ainsi peu de véritables innovations paradigmatiques, ce qui mène aux effondrements cycliques.
Orientations pour agir :
- Cartographier les leviers profonds : diagnostiquer récits, croyances et cadres avant d’engager des réformes.
- Co-construction narrative : associer parties prenantes à l’élaboration d’un récit partagé (vision, mythes d’avenir).
- Rituels de transition : instituer des pratiques collectives (cérémonies, ateliers immersifs) permettant d’installer de nouveaux cadres systémiques.
- Éducation à la complexité : former à repérer les boucles de rétroaction et à naviguer dans des environnements incertains.
- Boucles d’apprentissage : mesurer l’impact réel des changements sur toutes les couches du PsychoKernel, ajuster les cadres et les récits en continu.
En intégrant ces principes, il devient possible de « tuer » les schémas limitants, d’accueillir la rupture épistémique et de forger des paradigmes véritablement antifragiles et régénératifs.